Interview de Crystel Galli - 4 mars 2003
Auteur compositeur et interprète, quelles raisons t’ont poussée à écrire pour d'autres artistes plutôt que de te consacrer à une carrière solo uniquement ?
Effectivement, je ne fais pas que composer, je chante aussi. Mon style est un peu plus rythmé (il est proche de celui de Zazie, s'il doit être obligatoirement comparé à un style identifiable par le grand public). Thomas a du insister pour que je travaille avec lui. Je me suis dit que je pouvais essayer d'écrire pour lui en essayant d'adapter mon écriture pour qu'elle lui corresponde le plus possible.

Quelles circonstances t'ont permis de découvrir Thomas Gérôme ?
Je le connais depuis 4 ans. Nous nous sommes rencontrés à l'école d'Alice Dona.

As-tu écrit pour d'autres artistes que lui, si oui, lesquels ?
Thomas est celui pour lequel j'ai le plus écrit, mais j'ai aussi écrit pour un ou deux copains de la "Manufacture Chanson", une aventure qui s'est terminée en juin 2002. A la Manufacture j'ai suivi des cours d'écriture, de technique vocale, de solfège et de théâtre. Vous pouvez trouver un site internet sur lequel se trouve l'extrait d'une de mes chansons : www.manufacturechanson.org .

Sinon j'ai surtout écrit pour moi. J'ai commencé à écrire poussée par ce que ma mère m'a dit quand je lui ai annoncé que je voulais chanter. Elle m'a répliqué "Tu n'as pas de chanson" , alors j'en ai écrit. J'ai commencé assez jeune, vers 16-17 ans , j'en ai 26 maintenant. J'ai eu le goût de la scène bien plus jeune encore, vers 11-12 ans, la première fois que je suis montée sur scène avec la chorale de mon école.

Les chansons correspondent parfaitement à Thomas Gérôme, comment avez vous collaboré ensemble pour que les textes et la musique reflètent ainsi ses émotions ?
Nous nous sommes beaucoup parlé, ensuite, chaque chanson a sa propre histoire. Pour les autres chansons, l'écriture s'est faite "au feeling". Généralement je lui proposais un texte et Thomas changeait un ou deux mots par texte.

"Même" est la première que j'ai écrite pour lui. Je l'ai proposée à Thomas car je trouvais qu'elle correspondait mieux à un homme.

"Petite Star" est une chanson qui s'est faite très vite, j'ai proposé d'écrire pour la nièce de Thomas et il a accepté.

Ecrire des chansons peut prendre des années, parfois. Cela dépend de l'inspiration de l'humeur. Certaines restent dans des tiroirs jusqu'à ce qu'elles trouvent l'interprète qui leur convienne.

"L'homme assassin" est une très vieille chanson que j'avais écrite pour moi. Thomas l'aimait bien et se l'est appropriée. Les mots de cette chanson sont doux même si le thème est difficile. Il n'est pas nécessaire de crier pour faire passer la douleur dans le message.

De quelle façon ta rencontre avec l'auteur Claude Lemesle en octobre 1999 a-t-elle influencé ton écriture ?
"SOS de tendresse"" est justement une chanson qui est issue d'un exercice d'écriture datant de l'époque à laquelle j'ai travaillé avec Claude Lemesle. Le texte n'était pas fait spécialement pour Thomas. Mais il a eu envie de le faire sien.

Pour toi, la musique composée guide-t-elle l'écriture des paroles qui seront amenées à être posées dessus, ou bien préfères-tu partir d'un texte en accompagner ensuite la musicalité imposée par les mots ?
En fait, j'ai plein de vieilles chansons que je trouvais bien quand je les ai écrites à l'époque, qui ne me correspondent plus ou dont la façon d'exprimer le message qu'elles sont censées faire passer n'est pas adéquate, bien tournée. J'ai du mal à retravailler une chanson existante, ce n'est pas évident, mais je n'aime pas jeter, donc je ne jette rien et je relis régulièrement ce que j'ai fait, je reprends une phrase un refrain. Je laisse cela en repos un moment puis j'y reviens. J'attends d'avoir pu prendre assez de recul. La plupart du temps j'écris le texte et la musique en même temps, en alternance, l'un influençant l'autre.

Je me sens plus compositrice qu'auteure car je suis musicienne à la base. J'ai plus de facilité pour écrire une musique qu'un texte, j'éprouve plus de plaisir, aussi, à composer qu'à écrire des textes. La musique me vient plus naturellement, j'ai le contact plus facile avec le piano ou l'accordéon qu'avec ne feuille de papier.

Je ne suis pas quelqu'un qui m'astreint à un rythme d'écriture régulier, qui travaille tous les jours... Je fonctionne de façon plus instinctive, j'écris tout à coup, dans la rue, par exemple.

Je pars d'un sujet qui m'inspire, je relis de vieux travaux pour trouver de l'inspiration.

Quels auteurs/compositeurs t'influencent ?
Mon rêve absolu aurait été de travailler avec Michel Berger, si cela avait été possible... J'aime beaucoup Michel Fugain . Je ne cherche pas spécialement à travailler avec telle ou telle personne. Si cela se fait, tant mieux, sinon, ce n'est pas grave.

De nos jours, tout est formaté, électrisé. Ne crains-tu pas que l'accompagnement uniquement pianistique puisse écarter certaines chansons des ondes radios ?
Il est vrai que certaines maisons de musiques nous reprochent nos arrangements. Elles souhaiteraient des arrangements plus étoffés. Je pense cependant que les chansons qui ont du succès sont celles dans lesquelles les gens se reconnaissent, qui leur parlent.

J'aime bien les chansons au naturel, sans qu'il y ait trop d'électronique. Si une chanson est bonne, l'arrangement n'est qu'un "emballage cadeau" et cela ne change pas fondamentalement la chanson.

Il faut bien l'admettre, pourtant, les chansons qui sont choisies, signées, par les maisons de disque, sont celles que l'on entend dans "Popstar" ou "Star académy" car c'est ce qui marche actuellement.

Les radios fonctionnent aussi au "matraquage médiatique", elles partent du principe que plus on entend un titre, plus les gens l'auront en tête, l'aimeront, et plus le titre sera vendeur. Elles passent une chanson dix fois par jour. On finit par l'aimer.

Tout auteur se livre dans les paroles de ses chansons. Y a-t-il une chanson pour laquelle tu t'es dit que tu n'aurais pas du en dire autant ?
Non , jamais je ne me suis dit "Là, je suis allée trop loin". Au contraire, je me suis plutôt dit bien souvent "il faut que j'aille plus loin". Une chanson doit correspondre au plus proche de ce que l'on peut ressentir, il faut d'autre y mettre le plus possible de soi-même dedans.

Les chansons qui ont du succès, qui durent, dont les gens se rappellent sont celles dans lesquelles ils se reconnaissent. Ils doivent y trouver une part d'eux-même.

Quels sont tes projets pour un futur plus ou moins proche ?
Je fais aussi en ce moment une tournée en Suisse avec des musiciens. J'aimerais faire quelques concerts cet été, dans le cadre de festivals, par exemple.

 

Interview par Fab et Jik